Retour sur Africa Check

Le Niger enregistre-t-il 37% des accidents de la route en Afrique de l'Ouest?

Cet article date de plus de 7 ans

«Le Niger détient plus de 37% du taux des accidents de la route dans la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) [qui compte] quinze pays, selon les statistiques officielles», renseigne l’AFP, dans sa dépêche reprise par lepoint.fr.

En moyenne, poursuit-elle, «800 personnes meurent chaque année dans les accidents de la route au Niger, pays de 19 millions d'habitants, causés par l'imprudence des conducteurs et le mauvais état des routes, a indiqué mercredi le ministère nigérien des Transports (lors de la journée africaine de la sécurité routière)».

Cette information cadre-t-elle avec la réalité des accidents au Niger? Africa Check a vérifié.

D’où vient ce chiffre ?


Le journaliste de l’AFP qu’Africa Check a contacté indique comme source un article du quotidien national nigérien Le Sahel. «L'engagement des autorités (nigériennes) s'est traduit par la réactualisation de la loi rendant obligatoire le port du casque, l'interdiction du téléphone au volant, la réactualisation du code de la route qui date de 1960, la création, récemment, d'un Service d'aide médicale d'urgence (SAMU) et bien d'autres actions. Néanmoins, beaucoup restent encore à faire, car le Niger bat toujours le triste record en taux de gravité d'accidents, le plus élevé de l'espace CEDEAO, avec un taux de 37,4%», rapporte  son auteur, Aissa Abdoulaye Alfary.

Comment mesure-t-on la gravité des accidents ?


L’AFP donne le pourcentage par rapport au volume global des accidents dénombrés annuellement dans les 15 pays membres de la CEDEAO (Bénin, Burkina Faso, Cap-Vert, Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Liberia, Mali, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone, Togo).





La CEDEAO  n’a pas encore réalisé d’études officielles sur les accidents routières, malgré la création de l’Organisation ouest-africaine de la santé. C’est également le cas pour l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), qui a mis sur pied le Comité régional de la sécurité routière, en 2009, après avoir recommandé aux Etats membres de  développer une structure nationale en charge de la prévention des accidents de la route. L’indicateur de mesure de l’ampleur des accidents de la route est proposé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

La chargée de communication du département «gestion des maladies non transmissibles, handicaps et prévention des accidents» de l’OMS à Genève, Laura Sminkey, a confié à Africa Check qu’ « à l’OMS, le meilleur instrument pour faire des comparaisons, c’est le nombre de pertes en vies humaines par rapport à 100 000 habitants. «Je vous conseille de regarder le rapport Global Status Report on Road Safety 2015  et le tableau A2 », a dit Mme Sminkey.

«Vous aurez les nombres de personnes tuées sur la route estimés par les gouvernements, ceux de personnes mortes sur la route estimés par l’OMS, et le taux de mortalité basé par rapport à  100 000 personnes. Vous pourriez faire des comparaison entre les pays africains», a-t-elle précisé. Cet instrument de mesure a été utilisé par la Banque africaine de développement (BAD) pour réaliser, en 2013, une étude sur la «Sécurité routière en Afrique : Évaluation des progrès et enjeux du système de gestion de la sécurité routière »

Quelle était la situation des accidents au Niger ?



Le directeur de  l’UEMOA  chargé des transports terrestres et maritimes,  Gouali Emmanuel Yoro, s’est approprié cet indicateur pour aborder la situation des accidents de la route lors des journées francophones de la sécurité routière tenues à Montpellier, en 2010. Comme source,  le fonctionnaire de l’UEMOA mentionne dans son document introductif  le « rapport mondial 2009 de l’OMS paru le 15 juin 2010 ». Pour le  Niger, le taux de 37,7% est apparu dans le tableau récapitulatif du « taux de mortalité par accident de la route pour 100 000 habitants ».

Le Niger garde-t-il le même tempo en 2015 ?



Le dernier rapport sur les accidents et la sécurité routière réalisé par le Bureau régional Afrique de l’OMS  date  de 2015. C’est ainsi que les Etats africains ont été classés en fonction du ratio nombre de morts/100 000 habitants. Pour les membres de la CEDEAO,  le Liberia et le Togo occupent le haut du tableau.

Ratio mortalité par accidents routière pour 100 000 habitants dans la zone CEDEAO, selon les estimations de l’OMS en 2015

Conclusion : l’AFP s’est trompée d’indicateur


L’AFP a pris le pourcentage de décès au Niger causés par les accidents de la route (37% en 2007) et indiqué que c’est la part de ce pays sur le nombre de décès liés aux accidents de la route dans la zone CEDEAO. Elle a en outre fait référence à une vieille donnée au moment où des statistiques plus récentes ont été publiées sur ce sujet.

Pour le moment, les Etats membres de la CEDEAO s’approprient l’indicateur de l’Organisation mondiale de la santé (OMS)  selon lequel  les accidents de la route doivent être exprimés à partir du ratio nombre de personnes tuées sur 100 000 habitants d’un pays et non pas en pourcentage du nombre d’accidents.

Le ratio 37,7/100 000 habitants du Niger évoqué dans l’article date de 2007. C'est un chiffre contenu dans une étude de la Banque africaine de développement. entre temps, la situation a évolué. L’OMS signale ainsi qu’en 2015, le Niger a enregistré un ratio de 24,6 morts liées à des accidents pour 100 000 habitants.

Edité par Assane Diagne

Republiez notre contenu gratuitement

Veuillez remplir ce formulaire pour recevoir le code de partage HTML.

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
limite : 600 signes
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Voulez-vous continuer à lire nos vérifications des faits ?

Nous ne vous ferons jamais payer pour des informations vérifiées et fiables. Aidez-nous à poursuivre cette voie en soutenant notre travail

S’abonner à la newsletter

Soutenir la vérification indépendante des faits en Afrique