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Couverture médiatique du référendum: mode d'emploi

Les Sénégalais sont appelés aux urnes, le 20 mars 2016, pour se prononcer par référendum, sur le projet de réformes constitutionnelles du président Macky Sall. Depuis cette annonce, le débat sur le référendum occupe une bonne place dans les journaux.

Des journalistes chevronnés donnent des ficelles permettant d’éviter de tomber dans le piège consistant à se contenter des appels à voter oui ou non.

Le journaliste et formateur Tidiane Kassé estime que « dans ces moments, ce que les journalistes peuvent faire c’est de dire quelle est la pertinence de voter oui ou de voter non »

« Il faut poser les différents termes du débat », suggère le directeur de publication du quotidien Jour de Sports. « Macky Sall propose une réforme en 14 points qu’il faut expliquer point par point et montrer les avantages de chacun », selon lui.

Le rôle des journalistes pourrait consister à appeler les citoyens « à s’autodéterminer », dit-il à Africa Check, avant d’ajouter : « Quand il y a des questions à polémique, il faut voir les enjeux, aller au-delà des appels politiques et politiciens et voir l’intérêt des citoyens ».

Pour sa part, Hamadou Tidiane Sy, directeur de l’Ecole supérieur des métiers de l’internet, du journalisme et de la communication (E-JICOM), estime qu’il faut « absolument aller au-delà des simples appels à voter oui ou à voter non et éclairer l’opinion de la manière la plus complète et la plus équilibrée possible ».

Du choix des interlocuteurs


Les leaders du mouvement de jeunes rappeurs Y en a Marre, lors d’une conférence de presse en 2012. En 2016, ils appellent à voter non pour le référendum du 20 mars. Photo AFP Les leaders du mouvement de jeunes rappeurs Y en a Marre, lors d’une conférence de presse en 2012. En 2016, ils appellent à voter non pour le référendum du 20 mars. Photo AFP

«  Au-delà de cet équilibre qui doit être systématique dans la manière de couvrir les deux camps (celui du oui et  celui du non), je pense qu’il il est aussi très important de mettre chaque déclaration  dans son contexte et d’ajouter, à chaque déclaration traitée, les informations de background nécessaires à la bonne compréhension de telle ou telle prise de position ».

« Par exemple, présenter un salarié de la présidence comme « juriste » ou « expert » ne suffit pas à faire comprendre l’information dans son ensemble. De même, un professeur  d’université qui se trouve dans le bureau exécutif d’un parti politique ne peut se présenter uniquement et exclusivement comme « universitaire », ce serait tronquer l’information et fausser le débat », soutient M. Sy, ancien de la BBC et de l’Agence France-Presse (AFP).

Interrogé par Africa Check, il a invité les journalistes à « travailler avec les experts pour que les Sénégalais sachent réellement ce qu’on perd et ce qu’on gagne dans la nouvelle Constitution, en faisant parler les vrais experts indépendants ou par le biais d’un croisement de différents avis, et de préférence de sources non partisanes... ».

Une occasion de s’essayer au fact-checking


« C’est peut-être aussi une occasion pour nos médias de s’essayer au fact-checking, en passant au tamis toutes les déclarations faites par les uns et les autres. Car, il ne faut pas oublier que  dans leur volonté de manipuler l’opinion,  les politiciens et leur partisans prêtent injustement au projet de Constitution tel mérite ou tel inconvénient.

« Par exemple, est-il vrai oui ou non que si la nouvelle constitution est votée le second tour à la présidentielle va ‘disparaître’ de notre système électoral. Cela mérite un article de fact-checking puisque l’information a été véhiculée par certains », souligne-t-il.

Des membres de l'organisation M23 se réclamant de la société civile. En 2011 et 2012, ils étaient actifs le terrain politique et s'étaient opposés à la volonté de l'ancien président Abdoulaye Wade de modifier la Constitution. Photo AFP Des membres de l'organisation M23 se réclamant de la société civile. En 2011 et 2012, ils étaient actifs le terrain politique et s'étaient opposés à la volonté de l'ancien président Abdoulaye Wade de modifier la Constitution. Photo AFP

En outre, il conseille de « donner la parole aux citoyens ordinaires et surtout leur fournir le plus d’éclairages possible afin de leur permettre de faire des choix informés, pour ne pas dire éclairés ».

Sy prône l’élargissement du débat à des acteurs plus neutres et à la société dans son ensemble, à « ceux-ci ont aussi leur mot à dire sur la marche du pays », car, selon lui, « le référendum ne peut pas être que l’affaire des politiciens ».

Son analyse est appuyée par Jean Meissa Diop, membre du Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA). Selon lui, les journalistes sénégalais, pour bien couvrir, la campagne pour le référendum du 20 mars prochain, « devraient veiller à avoir équidistance et équilibre et équité dans le traitement de l'information ».

Eviter le piège du déséquilibre


L’ancien rédacteur en chef de Walfadjri conseille également à ses confrères d’ « éviter les équilibres spécieux, c'est-à-dire qui n'en sont pas à cause d'un déséquilibre entre les sources, déséquilibre d'intérêt entre les thèmes, les sujets... ».

« Il faut s'armer d'une précaution professionnelle devant les discours des deux camps, et cette précaution est d'ailleurs celle de tous les jours », soutient Jean Meissa Diop.

Le Sénégal dispose d'une vingtaines de quotidiens. Ici, un vendeur de journaux dans les rues de Dakar. Photo AFP Le Sénégal dispose d'une vingtaine de quotidiens. Ici, un vendeur de journaux dans les rues de Dakar. Photo AFP

« On peut attendre des journalistes plus d''originalité dans les angles de traitement, plutôt que de s'abandonner dans la routine du compte-rendu. En effet, il me semble intéressant que le Sénégal [indépendant] n'aura tenu que trois référendum (1963, 2001 et 2016) : combien avaient-ils coûté au contribuable - certainement en valeurs relatives, quand on veut la comparer celui de 2016 à ceux précédents ?’’, souligne Diop, qui enseigne également le journalisme.

Il conseille en outre d’éviter « le déséquilibre qui donnerait l'impression - comme jusqu'ici, que le référendum, c'est Dakar. Il est vrai que c'est Dakar qui fait le plus de bruit, mais qu'en est-il des autres localités - y compris les hamea

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