Baptisé Mosquirix ou RTS,S/AS01, « il est le premier et le seul vaccin antipaludique à réduire considérablement le paludisme et le paludisme grave potentiellement mortel chez les enfants africains », indiquait déjà l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) dans cette fiche de questions-réponses publiée en mars 2020.
Le 6 octobre 2021, l’OMS a annoncé qu’elle « recommande un vaccin révolutionnaire contre le paludisme pour les enfants à risque », précisant que ce vaccin « agit contre le P. falciparum », le parasite du paludisme le plus mortel au monde, et le plus répandu en Afrique ».
A child dies from #malaria every two minutes.
— World Health Organization (WHO) (@WHO) October 6, 2021
One death is one too many.
🚨 Today, WHO recommends RTS,S, a groundbreaking malaria vaccine, to reduce child illness & deaths in areas with moderate and high malaria transmission https://t.co/xSk58nTIV1#VaccinesWork pic.twitter.com/mSECLtRhQs
Dans le cadre d'une lutte antipaludique globale, l’institution onusienne recommande que le RTS,S/AS01 soit utilisé pour la prévention du paludisme à P. falciparum chez les enfants vivant dans des régions à transmission modérée à élevée telles que définies par l'OMS. « Le vaccin antipaludique RTS,S/AS01 doit être administré selon un calendrier de 4 doses aux enfants à partir de l'âge de 5 mois pour réduire la maladie et la charge du paludisme », prescrit l’OMS.
En effet, chez les enfants âgés de 5 à 17 mois ayant reçu quatre doses de RTS,S/AS01, le vaccin a évité environ quatre cas de paludisme sur dix (pendant 4 ans de suivi) et environ trois cas de paludisme grave sur dix, avec des baisses sensibles observées dans le nombre global des admissions hospitalières comme de celles dues au paludisme ou à l’anémie sévère, rapporte Malaria Vaccine Initiative, qui œuvre pour le développement de la vaccination contre le paludisme.
Le vaccin a aussi fait baisser de « 29 % les besoins de transfusions sanguines requises pour traiter les cas d’anémie potentiellement mortelle dus au paludisme ».
Depuis 2019, trois pays d’Afrique subsaharienne, le Ghana, le Kenya et le Malawi, ont commencé à introduire le vaccin dans des régions sélectionnées où la transmission du paludisme est modérée à sévère, dans le cadre d'un programme pilote de vaccination coordonné par l'OMS.
Au Malawi, la primovaccination est proposée à l'âge de 5 mois, tandis qu'au Ghana et au Kenya, la primovaccination est proposée à l'âge de 6 mois. Un schéma vaccinal de quatre doses est toutefois recommandé : « Les trois premières doses étant administrées à des intervalles d'un mois environ, et la quatrième dose vers le second anniversaire de l'enfant », explique l’OMS.
#DidYouKnow: One year ago, Malawi became the first country in the world to introduce a #malariavaccine to young children through routine immunization as part of a landmark pilot programme in Ghana, Kenya & Malawi. #WorldMalariaDay pic.twitter.com/rzfht0tTEY
— WHO African Region (@WHOAFRO) April 25, 2020
Un article publié le 25 août 2021 dans The New England Journal of Medecine, livre des résultats « concluants » d’un nouvel essai clinique qui a été mené auprès de 6 000 enfants, âgés de 5 à 17 mois, résidents au Burkina Faso et au Mali. Dans cette population étudiée, l’article indique que « la combinaison du vaccin et des antipaludiques de manière saisonnière, avant les pluies, a permis de réduire les formes sévères, et donc les épisodes cliniques, les hospitalisations et les décès, de 70 % par rapport à la prise exclusive des médicaments antipaludiques ». Dans le détail, « les cas d’infection étaient réduits de 63 %, les hospitalisations de 71 %, et les décès de 73 % ».
Selon l’OMS, à ce jour, plus de 2,3 millions de doses du vaccin ont été administrées dans les trois pays africains cités et aucun impact négatif, sur l'utilisation des moustiquaires, sur les autres vaccinations infantiles ou sur la recherche de la santé, n’a été relevé dans les régions où le vaccin a été introduit.
« La modélisation estime que le vaccin est rentable dans les zones de transmission modérée à élevée du paludisme », ajoute l’institution sanitaire mondiale.
Le dernier rapport sur le paludisme dans le monde de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu’« environ la moitié de la population mondiale est exposée au risque de contracter le paludisme. La malaria ou « paludisme » est « la première endémie parasitaire mondiale », rappelle l’Institut Pasteur. Transmise par piqûre de moustique, elle est provoquée par l’envahissement des globules rouges par un parasite de type Plasmodium. Cela peut donner lieu à des états sévères, allant jusqu’à entraîner la mort. L’OMS comptait « 229 millions de cas de paludisme et environ 409 000 décès dus au paludisme sur l’année 2019 ». La malaria tue tout particulièrement des enfants de moins de 5 ans. |
Le R21/Matrix-M et le PfSPZ-CVac d’autres candidats vaccins prometteurs
Des scientifiques du Burkina Faso et des chercheurs de l’Institut Jenner de l'Université d'Oxford et leurs partenaires ont mis au point le R21/Matrix-M, un candidat vaccin antipaludique de deuxième génération. Il s’agit en effet, « d’une version modifiée de RTS,S pour améliorer son immunogénicité et son efficacité », précise le Dr Hermann Sorgho, spécialisé en parasitologie à l'Institut national de recherche en sciences de la Santé (IRSS) au Burkina-Faso
Actuellement en évaluation de phase 3, « R21 est utilisé avec l’adjuvant Matrix-M qui est un adjuvant à base de saponine d’où le nom R21/Matrix-M. Le schéma vaccinal est de trois doses administrées avec un mois d’intervalle entre les doses », précise Dr Sorgho.
Dans leurs conclusions, les chercheurs notent qu'ils sont « les premiers à atteindre l'objectif de la feuille de route pour la technologie des vaccins contre le paludisme de l'Organisation mondiale de la santé d'un vaccin avec au moins 75 % d'efficacité ».
Un candidat vaccin contre le #paludisme démontre une efficacité inégalée de 77% lors d'essais dans des pays africains. Développé par l'université d'#Oxford, il suscite l'espoir d'une avancée majeure dans la lutte contre cette maladie tuant principalement des enfants #AFP 1/3 pic.twitter.com/sJyHZa5va0
— Agence France-Presse (@afpfr) April 23, 2021
« Les études précliniques ont démontré que R21 pouvait générer des titres élevés d’anticorps et une protection de 100 % chez la souris. Ensuite des essais cliniques sur des sujets humains – consistant à administrer du R21 suivi d’un challenge par infection expérimentale de plasmodium – ont montré que R21 pouvait avoir une efficacité de 63 à 78 % », souligne le Dr Sorgho.
L’OMS s’est félicitée des résultats prometteurs du R21/Matrix-M en termes d'efficacité contre le paludisme lors de cet essai clinique de phase 2. Mais reconnaît qu'il a été mené sur un nombre relativement faible d'enfants (450). « Les résultats des essais de phase 3 seront importants pour évaluer l'efficacité et le profil de sécurité du vaccin chez un groupe plus important d'enfants, et pour mesurer l'efficacité du vaccin dans des régions où le paludisme sévit toute l'année », indique l’organisation.
Aussi, des chercheurs de la compagnie de biotechnologie Sanaria Inc. ont récemment fait état de progrès dans le développement d'un autre candidat vaccin contre le paludisme, le PfSPZ-CVac. Lors d'un essai clinique de phase 1, le vaccin s'est révélé « très efficace auprès d'un petit groupe de volontaires humains infectés par le parasite du paludisme ». Dans cet article publié le 30 juin 2021 dans la revue Nature, il est indiqué que ce candidat vaccin s'est révélé sûr et efficace contre une variante du parasite du paludisme sur 100 % des participants, trois mois après leur dernière dose dans le cadre de l'essai.
En juin 2021, un article publié dans la Revue pharmaceutique européenne relève que des études cliniques signalent une efficacité de 75 % du vaccin PfSPZ-CVac dans la prévention du paludisme.
L’idée d’un vaccin remonte aux années 1970
La possibilité d'induire une protection contre le paludisme chez des volontaires sains vaccinés avec le parasite rendu moins virulent avait été démontrée dès les années 1970. Dr Sorgho de l'IRSS au Burkina-Faso renseigne que c’est « la chercheuse américaine Ruth Nussenzweig qui a été la première à démontrer en 1967 que l’injection de sporozoïtes irradiés conférait une protection contre l’infection palustre chez la souris. Cette capacité des sporozoïtes irradiés a été confirmé chez le sujet humain en 1973 par Clyde un autre américain ».
« Mais cette approche avait une limite évidente car il était impossible à l’époque de produire assez de sporozoïtes irradiés pour une utilisation à grande échelle », souligne Dr Sorgho. Ainsi, il a fallu attendre l’avènement de la technique de protéine recombinante dans « les années 1990 pour que Joe Cohen qui travaillait pour la firme pharmaceutique britannique GlaxoSmithKline (GSK) invente RTS,S en combinant la protéine de surface des sporozoïtes appelée CSP ou circumsporozoite protein avec l’antigène de surface du virus de l’hépatite B ».
Le premier essai de vaccination a été réalisé en 1997 à l’institut de recherche Walter Reed de l’armée américaine. D’autres essais ont ensuite été réalisés à travers différentes phases jusqu’à la phase 3 qui a débuté en 2009. Plus de 15 000 enfants ont reçu le vaccin dans sept pays africains (Burkina Faso, Gabon, Ghana, Kenya, Malawi, Mozambique et Tanzanie) durant cette phase 3 qui a duré 5 ans (2009-2014).
Dans les années 1990, un médecin colombien, Manuel Elkin Patorroyo, avait annoncé la découverte d'un vaccin contre le paludisme, connu sous le sigle SPF66, mais celui sera finalement considéré comme inefficace.
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