EN BREF - L'image ne montre pas des réfugiés soudanais en route vers le Tchad. Il s'agit plutôt de réfugiés éthiopiens qui se rendent au Soudan, fuyant les affres du conflit du Tigré, dans le nord de l'Éthiopie.
Khartoum, la capitale soudanaise, est le siège d’affrontements violents entre l’armée régulière et les Forces de soutien rapide (FSR), une unité paramilitaire composée d’ex-miliciens de la guerre du Darfour. Plusieurs localités du pays sont également touchées par ces affrontements.
L’armée régulière est dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhan, qui, dans les faits, a pris les rênes du pays depuis la chute de l’ancien président soudanais Omar el-Béchir, en avril 2019. al-Burhan dirige le conseil de souveraineté du Soudan qui assure la transition politique dans ce pays d’Afrique de l’Est enlisé dans une longue crise politique. Quant aux FSR, elles ont à leur tête Mohamed Hamdane Daglo, dit « général Hemetti ».
Sur ce sujet, lire aussi notre vérification du Programme Meta de vérification des informations : Soudan : la plupart de ces photos sont antérieures aux affrontements d’avril 2023 entre l’armée régulière et les forces paramilitaires
Contexte
Le président américain Joe Biden, a annoncé le 22 avril 2023, que son armée a mené une opération pour extraire le personnel diplomatique du gouvernement américain. De son côté, la France a annoncé avoir fait sortir du pays 100 personnes. L'ambassade de France au Soudan a été fermée jusqu'à nouvel ordre. D’autres pays comme le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Irlande, l'Italie, la Tunisie, la Libye, la Jordanie, l'Irak, le Liban ou encore la Turquie conduisent également des opérations d'évacuation de leurs ressortissants.
Au 25 avril 2023, le bilan de ces affrontements faisait état de plus de 420 morts et plus de 3 700 blessés selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). De son côté, le ministère soudanais de la Santé, cité par France 24 dans un article publié sur son site le 27 avril 2023, estimait qu’au moins 512 personnes ont été tuées et 4 193 blessées depuis le début du conflit.
Ce que dit la publication que nous examinons
C’est ainsi que le 21 avril 2023, la page Facebook Le tchadanthropus-tribune a partagé une publication qui prétend montrer, image à l’appui, des réfugiés soudanais fuyant vers le Tchad.

La légende indique : « Entre 10 000 à 20 000 réfugiés soudanais ont fui vers le Tchad. (Source HCR). Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a alerté, mardi, sur l’arrivée massive de réfugiés soudanais à l’est du Tchad (....) Le HCR a appelé toutes les parties à « protéger les civils, y compris les réfugiés et les personnes déplacées, et à respecter la sécurité du personnel humanitaire afin qu’une aide essentielle puisse être acheminée ».
Cette page se présente comme un blog présentant l’actualité au Tchad et en Afrique. Elle a été créée le 9 août 2013 et est gérée depuis le Tchad.
Des réfugiés éthiopiens en route vers le Soudan
Nous avons retracé l’origine de cette photo en procédant à une recherche inversée d’image à partir du logiciel TinEye.
Elle figure dans une dépêche de l’agence de presse turque Anadolu datée du 15 novembre 2020. L’article évoque « des milliers de réfugiés éthiopiens (en route) vers le Soudan (pour fuir) le conflit dans la région du Tigré, dans le nord de l'Éthiopie ».
Selon la légende attribuée à cette photo, on voit à l’image des « Éthiopiens qui ont fuit le conflit dans la région du Tigré, dans le nord de l'Éthiopie, en raison des affrontements lors de l'opération lancée par les forces du gouvernement fédéral contre le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), atteignent l'État d'Al Qadarif, au Soudan, le 14 novembre 2020 ».
L’image a été prise par un correspondant de l’agence de presse turque. Elle apparaît également ici, sur le site web de la chaîne de télévision qatari Al Jazeera. Elle montre également le « flux de réfugiés éthiopiens qui se poursuit de la région du Tigré au nord de l'Éthiopie vers la frontière soudanaise à un rythme croissant ».
A propos de la guerre du Tigré et du flux de réfugiés soudanais vers le Tchad
Dans la nuit du 3 au 4 novembre 2020, le gouvernement éthiopien, sous la direction du premier ministre Abiy Ahmad, a lancé une offensive dans la région du Tigré (nord du pays). Le gouvernement accuse les autorités de cette zone, notamment le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF, en anglais) d’avoir attaqué l’armée fédérale éthiopienne présente au Tigré. C’est l'élément déclencheur de ce qui sera appelé le conflit du Tigré ou la guerre du Tigré.
Dans un entretien accordé au site du quotidien économique et financier britannique, Financial Times, le médiateur de l'Union africaine, Olusegun Obasanjo, estimait qu’environ 600 000 pourraient avoir été tuées dans ce conflit. « Un chiffre important pour une province de quatre millions d'habitants, selon un observateur de la situation en Éthiopie, mais sans doute aussi sous-estimé par rapport à la réalité », relevait Radio France Internationale (RFI) dans un article datant du 18 janvier 2023 . Pour Amnesty International, une ONG internationale qui promeut la défense des droits de l'Homme et le respect de la Déclaration universelle des droits de l'Homme, la guerre du Tigré est l’un des conflits les plus meurtriers et les plus violents de la planète.
Le 2 novembre 2022, à quarante huit heures du deuxième anniversaire de ce conflit, le gouvernement éthiopien a conclu, avec le Front de libération du peuple du Tigré, un accord de « cessation des hostilités » et de « désarmement méthodique » pour mettre fin à la guerre. L’accord a été signé à Pretoria, en Afrique du Sud.
Par ailleurs, le Haut Commissariat des Nations unies (HCR) a indiqué, dans un communiqué rendu public le 24 avril 2023, que selon les équipes du HCR, entre 10 000 et 20 000 personnes ont fui ces derniers jours le conflit au Darfour, une province de l’ouest du Soudan, pour trouver refuge au Tchad voisin ».
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