Retour sur Africa Check
Montage / Africa Check

Attention, cette vidéo ne montre pas l’agression violente d’un Noir en Tunisie

EN BREF - La vidéo montre plutôt le film de l’agression d’un Gambien en France en 2021.

En mars 2023, des pays d’Afrique de l’Ouest ont organisé des opérations de rapatriement de leurs ressortissants de Tunisie, où les agressions contre des Africains se sont multipliées. En cause : la déclaration faite le 21 février 2023 par le président tunisien Kaïs Saïed, parlant de « mesures urgentes » à prendre contre des migrants d’Afrique au sud du Sahara qu’il a accusés d’être à l’origine de « violences », « crimes » et « pratiques inacceptables ainsi que (de) pratiques légalement criminelles » dans son pays.

Ses propos ont suscité un tollé de condamnations, en Tunisie comme en Afrique et dans le monde, les uns dénonçant du racisme, d’autres, de la xénophobie, tandis que certains les ont qualifiés de haineux.

Sur Facebook, le compte enregistré sous le nom d’Inoussa Donkane, localisé à Ouagadougou, au Burkina Faso d’après ses informations fournies à la plateforme, a publié le 2 mars 2023 une vidéo étant, selon lui, l’agression d’un Noir en Tunisie.

(Note de la rédaction : attention, ce contenu est violent et risque de heurter certaines personnes.)

La séquence, qui dure une minute et 29 secondes, est filmée en plongée, c‘est-à-dire au-dessus des personnes, depuis un point en hauteur. Sur fond de tohu-bohu, on y voit un Noir vêtu d’un T-shirt blanc pris à partie dans une rue par un groupe d’hommes à la peau claire sans que l’on puisse cependant déterminer leurs origines. Ses agresseurs lui assènent des coups de poing et de poignard, il essaie de se défendre. Blessé, leur faisant face, il monte à reculons quelques marches d’un escalier, s’arrête puis s’écroule, son T-shirt blanc et le sol devenant rouges de son sang. Pendant qu’il est à terre, un des agresseurs revient lui donner des coups de pied puis s’en éloigne, soutenu par un autre homme, pendant qu’on entend distinctement, en français, une voix masculine lancer : « Ho, je te filme, co**ard ! Hé, co**ard, je te filme ! ».

Dans le texte accompagnant la vidéo (nous en avons corrigé les fautes, pour une meilleure compréhension de son propos, NDLR), Inoussa Donkane clame : « Voici ce qui se passe en Tunisie ». L’internaute poursuit : « Il a été poignardé, vieux et jeunes sont d'accord avec ce qui passe puisqu'ils y participent. Ils s’en prennent à tous ceux qui sont noir, quel que soit (leur) rang social ».

Capture d'écran de la publication

Sur ce compte

Inoussa Donkane se présente comme un créateur digital, mettant en avant son appartenance à une « jeunesse consciente ». Il était suivi par plus de 5 200 personnes au 24 mars 2023. Son compte a été créé le 15 janvier 2010 et, comme mentionné plus haut, il réside à Ouagadougou, la capitale burkinabè.

 

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Même vidéo, prétendue agression d’un Ivoirien en Tunisie

La vidéo publiée le 2 mars 2023 par Inoussa Donkane a été publiée le 5 mars 2023 par un autre utilisateur de Facebook identifié comme Mahamat Khère Guero.

Cet internaute également localisé à Ouagadougou affirme également qu’il s’agit de l’agression d’un Noir en Tunisie. Mais il précise que l’homme agressé est « le président de l'association des Ivoiriens » dans ce pays d’Afrique du Nord, qui a été « tué violemment par les Tunisiens lors d'un échange de coups ».

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Mais attention, cette vidéo est trompeuse.

Film de l’agression d’un Gambien en France en 2021

Les résultats de la recherche inversée d’images avec le logiciel SmallSeoTools renseignent qu’elle est authentique mais n’a aucun lien avec les évènements de février et mars 2023 en Tunisie.

Elle apparaît dans un article publié le 21 juin 2021 par le site Musulmans en France, qui se présente comme « un journal d'informations libre, indépendant de toute organisation politique ou religieuse ». Ce média précise qu’il « n'appartient à aucun courant, aucune tendance, mais permet à tous de s'exprimer, dès l'instant où leurs propos reflètent, dans leur diversité, les valeurs authentiques de l'islam, celles du ‘juste milieu’ ».

L’article évoqué est un entretien avec le responsable d’un mouvement contre la négrophobie, qui a rapporté que l’agression avait eu lieu le 26 mai 2021 à Saint-Étienne, dans le sud-est de la France. De même source, le jeune homme agressé est un Gambien. Admis à l’hôpital, il est décédé de ses blessures le lendemain de l’attaque. Ses agresseurs sont des Arméniens, qui ont été arrêtés et inculpés de « meurtre avec armes, en réunion ».

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Le 27 mai 2021, plusieurs médias français avaient parlé de cette agression à Saint-Étienne, fournissant des détails concordants sans toutefois mentionner de nationalités pour l’homme agressé et ses agresseurs. C’est le cas notamment de la radio publique France Bleu Saint-Étienne Loire et du journal Le Progrès qui avait donné les premières indications sur l’attaque sanglante dès la veille, le 26 mai 2021 : « Mercredi soir (le 26 mai 2021, NDLR), vers 21 h 35, les pompiers ont été appelés par des riverains de la rue Colette, dans le quartier de La Métare, à Saint-Etienne », pour secourir un homme qui « venait d’être victime de coups de couteau ». Devant la gravité de ses blessures, il a été transféré à l’hôpital.

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Dans un article mis en ligne le 29 mai 2021, le journal Le Figaro a fait état du décès du jeune homme agressé et de l’arrestation de suspects, en évoquant des nationalités : « Trois hommes de nationalité arménienne ont été écroués dans la nuit de vendredi à samedi (28 au 29 mai 2021, NDLR), après le meurtre mercredi soir (26 mai 2021, NDLR) à Saint-Etienne d'un Gambien (…) ». D’après ce quotidien, « les trois suspects, âgés de 28, 32 et 62 ans, dont un père et son fils, ont été mis en examen pour ‘meurtre avec armes, en réunion’ ».

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Ces informations ont aussi été rapportées par le journal Le Parisien dans un article publié également le 29 mai 2021. D’après le texte, « des riverains avaient filmé la scène » de l’agression du jeune homme « puis avaient transmis la vidéo aux enquêteurs. (…) L’intervention de la police avait permis d’interpeller un premier membre du groupe (des agresseurs (NDLR), dont les vêtements portaient des traces de sang. Deux autres interpellations avaient suivi ».

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