EN BREF - Une photo d'immeubles sinistrés utilisée par le compte privé Isa Polat sur Facebook pour une publication relative aux séismes ayant affecté le sud-est de la Turquie le 6 février 2023 n'est pas liée à ces catastrophes. L'image remonte au tremblement de terre survenu en 1999 dans les environs d'Izmit, dans le nord-est du pays. Elle a notamment été utilisée dans un film documentaire d'un réalisateur étatsunien sur les catastrophes naturelles sorti en salles en 2004-2005.
De nombreuses villes du sud-est de la Turquie (Nurdagi, Gaziantep, Kahramanmaras, Hatay, Osmaniye, Adiyaman, Malatya, Sanliurfa, Adana, Diyarbakir et Kilis) ont été frappées dans la nuit du dimanche 5 février 2023 au lundi 6 février 2023 par un séisme de grande ampleur. Ce tremblement de terre a atteint une magnitude de 7,8 sur l’échelle de Richter, un instrument qui, indique le magazine français Géo dédié à « la connaissance du monde » et de l’environnement, évalue « l’énergie qui se dégage » lors d’un tel cataclysme (la magnitude).
Sur les niveaux d'intensité des séismes
Nommée d’après le physicien et sismologue américain Charles Francis Richter qui l’a élaborée en 1935, cette échelle mesure généralement des niveaux d’intensité allant de 1 (quand la secousse n’est pas perçue) à 9 et au-dessus (lorsque les secousses dévastent la zone où elles surviennent sur plusieurs milliers de kilomètres à la ronde). « Ainsi, une magnitude 5 correspond au niveau 5 sur l’échelle de Richter, sur laquelle une élévation de 1 point correspond à une énergie 10 fois plus importante. Un séisme de magnitude 5 est donc 10 fois plus puissant qu’un séisme de magnitude 4. En principe, l’échelle de Richter n’a pas de limite supérieure, mais les géologues pensent que la résistance maximale des roches terrestres empêche tout séisme supérieur à 10 », explique Géo.
Selon l’Institut sismologique américain (USGS), une première secousse d’une magnitude de 7,8 est intervenue en pleine nuit, à 4h17 locales le 6 février 2023 à Nurdagi, qui en a été l’épicentre, c’est-à-dire l'endroit où le séisme en Turquie a eu la plus grande force. Elle a été suivie onze minutes plus tard par une autre d’une magnitude de 6,7.
Le nord de la Syrie, frontalier de la Turquie, a également été touché par ces séismes, qui ont causé plus de 40 000 morts dans ces deux pays, selon un bilan au 16 février 2023.
Dans un message posté le 6 février 2023, le compte Facebook Isa Polat a écrit : « Malheureusement, un séisme de magnitude 7,8 a frappé le sud-est de la Turquie ce lundi 6 février et plusieurs pays de la région. Le dernier bilan laisse présager d'importants dégâts matériels et humains ! Je souhaite toutes mes condoléances aux familles et un prompt rétablissement aux blessés ».
La publication est illustrée par une photo d’immeubles en ruine censée montrer les dégâts de la catastrophe.

Isa Polat est un compte privé comme l’indique la partie Intro. Il est localisé à Schaerbeek, une commune de Bruxelles, capitale de la Belgique.

La recherche inversée d’images à partir du logiciel TinEye nous permet de voir que cette image n’a aucun lien avec le séisme de février 2023, même si, d’après les résultats de nos vérifications, elle a été prise en Turquie après un tremblement de terre il y a près d’un quart de siècle.
Photo utilisée dans un documentaire datant de 2004
Elle figure dans la banque d’images en ligne Alamy, où elle a été postée le 13 août 2021 par Photo 12, une agence française de clichés d’archives et d'illustrations.

Selon les indications fournies dans la légende, la photo des immeubles effondrés provient d’un film intitulé « Forces de la nature » (« Forces of Nature », dans la version originale), réalisé par l’Américain George Casey et sorti en 2004.
Il s’agit d’un court métrage documentaire (40 minutes) qui a été disponible en salles en France à partir d’avril 2005, d’après AllôCiné, site initialement dédié aux renseignements pratiques « pour sortir au cinéma » dans ce pays européen et devenu au fil des ans une banque d’informations et d’archives sur les productions cinématographiques, leurs artistes et techniciens.
Le film traite de phénomènes naturels dévastateurs les séismes, les réveils de volcans ou encore les cyclones. On peut encore en visionner la bande-annonce sur AllôCiné, ainsi que deux extraits (1, 2).
(Note : Attention, il existe d’autres films portant un titre équivalent en français ou en anglais, pouvant prêter à confusion avec le documentaire de George Casey. C’est le cas notamment de « Forces of Nature » (1999), une comédie réalisée par la Canadienne Bronwen Hugues, mettant à l’affiche Sandra Bullock et Ben Affleck, qui s’intitule en français « Un vent de folie ». C’est le cas aussi de « Force of Nature » (avec « Force » au singulier, 2020-2021), un film d’action réalisé par l’Américain Michael Polish avec en tête d’affiche Mel Gibson et Kate Bosworth.)
Photo datant de 1999
Une recherche plus poussée sur la photo des immeubles affaissés la fait apparaître dans une éphéméride mise en ligne le 17 août 2011 par TwistedSifter, un blog agrégateur de contenus.
Le site précise qu’il s’agit d’une image d’un tremblement de terre ayant frappé le 17 août 1999 les environs de la ville de Gölcük et de la zone d’Izmit, dans le nord-ouest de la Turquie.
Il indique comme source de la photo le site du Carnegie Science Center, un musée de la ville de Pittsburgh, en Pennsylvanie, dans le nord-est des États-Unis d‘Amérique. Aucun détail n’est fourni sur la personne ayant pris cette photo ou la structure pour laquelle elle a été faite.

Le lien vers le musée étatsunien mentionné par TwistedSifter pour le crédit n’était plus actif au 16 février 2023. Mais en interrogeant l’outil de recherche des archives d’Internet WayBack Machine sur la même adresse, l’on constate que la photo figurait bien sur le site du Carnegie Science Center le 22 octobre 2015 et le 4 septembre 2017.

La même photo apparaît en interrogeant le moteur de recherche russe Yandex, avec les mêmes indications de date et lieux : « Tremblement de terre d’Izmit », survenu « le 17 août 1999 », peut-on lire dans les résultats qui s’affichent en russe (nous avons utilisé une traduction automatique du russe vers le français faite par Bing, le moteur de recherche de Microsoft.) De même source, « sa magnitude était de 7,6 sur l’échelle de Richter ».


L’image des immeubles effondrés est également utilisée dans un dossier publié le 1er avril 2006 par le site du magazine Pour la Science, publication dédiée à l’information scientifique internationale et pluridisciplinaire.

« Le séisme du 17 août 1999 en Turquie fit au total 18 000 morts à Gölçük et dans la région d’Izmit », est-il notamment écrit dans la légende.
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