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GUIDE - Comment savoir si un article de presse est fiable

Face à un sujet important, faites preuve de prudence quant à ce que vous voyez et partagez sur les réseaux sociaux.

Les événements marquants de l'actualité génèrent inévitablement des flots de fausses nouvelles sur les réseaux sociaux, à travers des affirmations, des messages, des vidéos ou des enregistrements audio.

Le décès de la reine Elizabeth II du Royaume-Uni en septembre 2022, par exemple, a donné lieu à des messages sur Facebook affirmant qu'elle était morte bien avant le 8 septembre 2022, ce qui a été vérifié et évalué comme étant incorrect par Politifact, le site internet de vérification des faits de l’Institut Poynter aux États-Unis. Autre exemple : une vidéo ayant circulé dans le contexte de la  guerre en Ukraine déclenchée par la Russie, et censée montrer un pilote ukrainien surnommé « le fantôme de Kiev » en train d’abattre un avion de combat russe Sukhoï (ou Soukhoï) Su-35 à partir d'un avion de chasse  MiG-29. En réalité, les images provenaient d'un jeu vidéo.

On s'inquiète beaucoup, et à juste titre, de la façon dont ce flot de fausses nouvelles affecte les gens et leur compréhension des événements. Africa Check a publié un certain nombre de guides expliquant comment reconnaître et faire face à ces infox, selon le terme consacré en français. D'une manière générale, il est toujours utile de faire preuve d'un scepticisme sain en certaines occasions, comme lorsqu'on lit le dernier message qu’on nous a transféré sur WhatsApp. Oui, WhatsApp fait également partie des réseaux sociaux.

Mais il est par ailleurs possible qu'un article de presse apparemment fiable soit mensonger ou biaisé. Lorsqu’il est partagé sur les réseaux sociaux, ce genre de nouvelles perpétue le cycle des contre-vérités.

Pour repérer ce type d'articles (avant de penser à le partager), il est utile de comprendre comment fonctionne l'information en ligne. Ces publications sont gérées par des êtres humains faillibles qui travaillent dans les délais impartis et rendent souvent compte d'événements dont les détails changent en permanence, ainsi que le rappelle un article publié le 1er mars 2022 (en anglais) dans le journal Scientific American, sur la couverture de la pandémie due au coronavirus 2019 (Covid-19) : « Il n'est plus possible de séparer science et politique », constate Tanya Lewis, l’auteure de ce texte intitulé « Comment la pandémie a transformé le journalisme scientifique ».

Dans un contexte d'évolution constante des informations disponibles, les lecteurs doivent rechercher des médias fiables, des médias qui, notamment, s'excusent et apportent des corrections lorsqu'ils se trompent.

Malheureusement, il n'existe pas de moyens simples permettant de savoir si un site d'information est crédible. Et les « faux » sites d'information sont souvent difficiles à distinguer des vrais.

En général, un simple coup d'œil suffit aux journalistes et autres personnes compétentes en matière d'information pour déterminer, instantanément et instinctivement, si un article ou un site web d’information est authentique ou non. La bonne nouvelle, c'est que les signes qu'ils recherchent sont assez faciles à repérer. Au début, cela demande un peu de travail, surtout pour les lecteurs qui manquent de temps ou qui sont submergés d'informations.

Mais les étapes suivantes peuvent devenir une seconde nature pour vous. Il est utile de les suivre dans l'ordre indiqué ci-dessous.

Étape 1 : L’information vous semble-t-elle raisonnable ?

C'est le test le plus rapide. Si l'information vous paraît étrange, du genre : « La reine ne peut sûrement pas être un lézard ? », alors, elle est probablement étrange. Faites une recherche rapide sur Google ou votre moteur de recherche habituel - il y en a plusieurs : Bing, Qwant, DuckDuckGo, Ecosia, pour ne citer qu’eux - avec les mots clés "reine, lézard" pour voir si l'information a été rapportée par plusieurs médias. Si c'est le cas, l'article a toutes les chances d'être vrai. Examinez ensuite ces différents liens. Certains d'entre eux proviennent-ils de médias fiables que vous connaissez déjà ? Si c'est le cas, l'article est assurément exact.

Exemple : Les affirmations sur Twitter selon lesquelles la compagnie aérienne irlandaise RyanAir posait aux passagers une série de questions en afrikaans pour vérifier s'ils étaient sud-africains semblaient absurdes. Mais une recherche Google avec les mots-clés "RyanAir Afrikaans test" a permis de trouver un article de l'Associated Press (AP) repris par la radio américaine National Public Radio (NPR), ainsi qu'un article du célèbre journal sud-africain City Press. L'histoire est bel et bien exacte, mais elle paraît toujours aussi absurde.

Étape 2 : S'agit-il d'une source fiable ?

Les sites d'informations fiables sont généralement les sites web de journaux locaux ou nationaux de votre pays ou les sites web des grands médias. Malheureusement, il n'existe pas de moyen immédiat permettant de savoir de quelles publications et de quels organes de presse il s'agit. C'est généralement quelque chose que l'on apprend au fil du temps.

Mais il existe un point de départ : demandez-vous si vous avez déjà entendu parler du média en question. Si ce n'est pas le cas, une recherche rapide sur Google ou votre moteur de recherche habituel du nom du média devrait vous donner une idée de qui ou de quoi il s'agit.

Vous pouvez également faire passer l'URL de l'article, c’est-à-dire le lien, par KnowNews, un outil de monitoring des médias (en anglais) qui vous aide à évaluer la crédibilité d’un site web à partir d’informations contenues dans la base de données de Media Monitoring Africa, une plateforme créée en Afrique du Sud dont l’objectif principal est de promouvoir un journalisme éthique et équitable qui soutient les droits humains. Si le site n'est pas enregistré dans la base de données, il sera signalé pour examen. Il existe une extension pratique de KnowNews pour le navigateur Google Chrome. Vous pouvez la télécharger ici. News Guard, une plateforme dédiée à apporter plus d'informations aux personnes sur les sources des informations qu'elles découvrent en ligne, propose un outil similaire pour évaluer la crédibilité des sites web aux États-Unis.

Bon à savoir : De nombreux sites d'information s'approvisionnent auprès d'agences de presse, comme dans l'exemple mentionné plus haut concernant RyanAir. Il s'agit d'entreprises qui recueillent des informations, rédigent des dépêches à partir de ces informations et les vendent ensuite à de nombreux autres médias. Parmi les grandes agences de presse, citons AP, Reuters, l’Agence France-Presse (AFP) et Bloomberg.

Si vous connaissez un site et que vous lui faites confiance, il n'est pas nécessaire d'aller plus loin dans la vérification des faits. Mais si vous avez encore des doutes, voici d'autres éléments à vérifier.

Étape 3 : Que dit le site sur lequel se trouve l'article à propos de lui-même ?

Si vous consultez un site ou un article sur un ordinateur ou sur votre téléphone, faites défiler l'écran vers le bas et regardez le bas de page, ou consultez le menu principal du site. Posez-vous les questions suivantes : le site web comporte-t-il une section « À propos » ou « Nous contacter » ? Dans l'une ou l'autre de ces deux sections, y a-t-il un lien pour les corrections ou les requêtes ? Y a-t-il une politique de confidentialité ou une section sur les conditions d'utilisation, ou les deux ? Une adresse physique est-elle indiquée ? (Pour aller plus loin, vérifiez si vous pouvez trouver l'adresse sur Google Maps.)

Exemple : Regardez BBC Afrique, le site en français pour l’Afrique du média public britannique BBC.

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La présence ou l'absence des éléments évoqués plus haut sur un site d'informations est importante, car c'est ainsi qu'il démontre sa volonté d'être en contact avec ses lecteurs et sa volonté de se soumettre à des règles de conduite légales.

Faites attention, car il existe de « faux » sites d'information qui reprennent ces éléments. Mais lorsqu’un site n’affiche pas ces éléments, c'est un signal d'alarme qui doit vous inciter à ne pas tenir compte de ce que vous y voyez.

Il convient également d'examiner de plus près l'URL du site web. Les sites d'information qui diffusent des infox se font souvent passer pour des organisations légitimes en modifiant les chiffres et les lettres de l'adresse d’un site web reconnu.

Exemple :  Avoir « CMN » dans l'URL d'un site web au lieu de CNN, sigle de la chaîne de télévision américaine d’information en continu Cable News Network.

Étape 4 : L'article est-il daté ? Contient-il des liens vers des sources d'information ?

Si tous les points précédents ont été vérifiés et que vous avez encore des doutes, jetez un coup d'œil sur le texte de l'article. Il est de bon augure que la date de publication soit clairement indiquée, de même que les liens vers des sources d'information.

Si ces éléments sont absents ou masqués, si le texte comporte des fautes ou semble avoir été rédigé à la hâte, prudence. Méfiez-vous également des contenus qui déclenchent rapidement des émotions telles que l'anxiété ou la peur.

Étape 5 : Les photos sont-elles créditées ?

Un autre signe d'un site sérieux d'information est qu'il s'engage à indiquer où il a obtenu ses illustrations. Les sites douteux, en revanche, se contentent d'utiliser des photos sans mentionner la source.

De même, l'article mentionne-t-il le nom d'un journaliste ? Pouvez-vous trouver d'autres exemples de son travail ? Les articles rédigés par un membre de la rédaction sont parfois un indice.

Étape 6 : Y a-t-il des signes indiquant que le site est régi par les organes de régulation des médias du pays dans lequel il publie ?

Cette information se trouve généralement dans le bas de la page ou dans le menu principal du site, et elle varie d’un pays à l’autre. Elle peut se présenter sous la forme suivante : « Cette plateforme souscrit à un code de conduite tel que défini par la réglementation ».

Tous les grands acteurs des médias d'un pays doivent souscrire aux cadres réglementaires en vigueur.

En Afrique du Sud, les médias sont réglementés par deux organismes principaux : le Conseil de la presse d’Afrique du Sud et la Commission des plaintes contre la radiodiffusion d’Afrique du Sud (BCCSA). Chacun dispose d’un code de conduite.

Ces organismes peuvent, dans le cas de la BCCSA, imposer des amendes ou, dans le cas du Conseil de la presse, exiger des excuses.

Au Kenya, les médias sont réglementés par l’Autorité des communications du Kenya (Communications Authority of Kenya), qui octroie des licences et régule le contenu, et par le Conseil des médias du Kenya (Media Council of Kenya), qui veille à ce que les normes médiatiques soient respectées.

Au Nigeria, la Commission nationale de diffusion (National Broadcasting Commission) réglemente le secteur de la radiodiffusion, tandis que le Conseil nigérian de la presse (Nigerian Press Council) veille à ce que la presse du pays respecte les normes éthiques.

Pour le cas du Sénégal, le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA) est chargé d’assurer la cohésion du secteur pour les radios et télévisions, et le Conseil pour l’observation des règles d’éthique et de déontologie (Cored), de veiller au respect des conditions d’accès et d’exercice de la profession de journaliste et de technicien de la communication, en vertu de son pouvoir d’organe d’autorégulation.

Pour faire respecter les règles de pluralisme, d’éthique, de déontologie, les lois et règlements en vigueur dans le domaine de l’audiovisuel, ces deux structures peuvent recourir  à différentes sanctions et mesures.

Bref, ouvrez l’œil, aidez-vous d’une loupe de détective et prudence !

S'il s'agit d'une information assez importante, prenez tout ce que vous voyez sur les réseaux sociaux avec des pincettes. Si les informations que vous voyez semblent provenir d'un site web d'actualités, cliquez sur la source et examinez-la en suivant les étapes décrites en haut. Faites de même avec les articles qui peuvent apparaître dans le fil d’actualités de votre téléphone. Une fois l’article vérifié, vous pouvez le partager.

Renee Moodie est une journaliste qui a été, pendant plusieurs années, rédactrice en chef adjointe d’Independent Online dit IOL, un des plus vieux sites d’information d’Afrique du Sud. Son entreprise de communication, Safe Hands Writing & Editing - que l’on peut traduire par « La rédaction et l'édition en toute sécurité » -, compte des clients dans les domaines de l'information en ligne, de l'édition, de l'enseignement et du secteur privé.

 

Traduit de l’anglais par Azil Momar Lô. Édité par Valdez Onanina et Coumba Sylla.

La version originale de cet article a été publiée le 7 octobre 2022 sur notre site en anglais : "Guide: How to tell if a news article is reliable".

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