EN BREF - Cette image a été prise en février 2012 et montre plutôt les protestations au Sénégal pour empêcher une troisième candidature à l'élection présidentielle d'Abdoulaye Wade, qui a dirigé le pays de 2000 à 2012.
Sur Facebook, un internaute identifié comme Lansana le messager du métro a publié le 1er juin 2023 une photo où l’on voit notamment un homme en uniforme braquant une arme vers une cible ou des cibles non identifiées, accompagné d’une phrase sans nuance (reproduite telle qu’écrite, NDLR) : « Des policiers tuent les manifestations au Sénégal ».
Violences de juin 2023 au Sénégal
Le Sénégal a été secoué par des violences au début du mois de juin 2023 - essentiellement entre le 1er et le 3 juin 2023 - à la suite de la condamnation à de la prison ferme d’Ousmane Sonko, chef d’un parti de l’opposition politique, Pastef (Les Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité ou encore Les Patriotes).
Plusieurs personnes ont été tuées dans ces troubles : le ministère sénégalais de l’Intérieur a fait état de seize morts, Pastef a parlé d’au moins 30 tués, tandis que l’organisation de défense des droits humains Amnesty International a affirmé avoir décompté « au moins 23 morts ». Selon elle, ces décès, « dont plusieurs par balles, (…) ont été enregistrés à Dakar et Ziguinchor », ville du sud du Sénégal dont Ousmane Sonko est le maire. Des centaines de personnes ont également été arrêtées en lien avec ces évènements, selon les autorités.
Des manifestations de protestation violemment réprimées, et émaillées de saccages, pillages et restriction de communications, ont éclaté le 1er juin 2023 après l’annonce de la condamnation d’Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme et 600 000 francs CFA (près de 915 euros / plus de 1 000 dollars américains) pour « corruption de la jeunesse » à l’issue d’un procès pour viols et menaces de mort devant une cour criminelle à Dakar. Il a été jugé sur plainte, en 2021, d’une employée d’un salon de massage qu’il fréquentait. La Cour a disqualifié l’accusation de viol en « corruption de la jeunesse », Sonko « a en revanche été acquitté des accusations de menaces de mort », a précisé le site Afrique du journal français Le Monde dans un article publié le 1er juin 2023 (et mis à jour le 2 juin 2023).
Pastef a dénoncé la procédure contre son chef, estimant qu’elle relève d’une tentative de l’empêcher d’être en lice pour l’élection présidentielle de février 2024 au Sénégal. Dans une déclaration devant la presse à Dakar le 18 août 2022, Ousmane Sonko a annoncé son intention de se porter candidat à ce scrutin.
Avant l’annonce du jugement rendu le 1er juin 2023, Sonko avait été condamné le 30 mars 2023 à deux mois de prison avec sursis dans le cadre d’un procès pour diffamation sur plainte de Mame Mbaye Niang, actuel ministre sénégalais du Tourisme et des Loisirs.
À propos de la publication du 1er juin 2023 de Lassana le messager du métro
La photo postée par la page Facebook de l’internaute, qui se fait également appeler Kayz Fof, montre un homme en tenue de policier, à gauche du cadre. Il est à pied et tient à deux mains un pistolet pointant vers une ou des personnes qui n’apparaissent pas à l’image. Sur la photo, figure un autre homme en tenue de policier, derrière la portière avant, ouverte côté passager, d’un véhicule tout-terrain. Ce deuxième homme, en lunettes noires et béret, fixe l’objectif de l’appareil photo.
La description faite par l’internaute (« Des policiers tuent les manifestations au Sénégal. ») et la date de la publication, le 1er juin 2023, laissent croire que la photo est liée aux évènements qui étaient alors en cours dans ce pays d’Afrique de l’Ouest.

À propos de cette page Facebook
Cette page Facebook est animée par un activiste sénégalais vivant en France, qui se présente comme journaliste, chroniqueur politique. Créée le 10 novembre 2019, elle a changé plusieurs fois de nom. Elle est gérée depuis la France et le Sénégal d’après les informations fournies à Facebook.
Certaines de ses publications ont dans le passé été vérifiées par Africa Check, mettant en lumière des allégations fausses ou trompeuses (1, 2, 3).



Une photo bien prise au Sénégal mais en février 2012
La recherche inversée d’images à partir du logiciel TinEye permet de constater que la photo publiée le 1er juin 2023 sur Facebook par l’internaute Lansana le messager du métro n’a pas été prise en juin 2023.
Elle figure dans la version en anglais de la banque d’images en ligne Alamy sous la référence ID : 2P6M5TT. Selon les détails fournis par Alamy, la photo a été prise le 17 février 2012 à Dakar par Rebecca Blackwell pour l’agence Associated Press (AP).

« Un policier réagit en tirant des balles réelles d'un pistolet, après avoir été frappé à la tête avec une pierre par des manifestants anti-gouvernementaux, lors d'affrontements en cours dans le centre de Dakar, au Sénégal, vendredi 17 février 2012 », peut-on lire dans la légende, en anglais. Selon cette description, les manifestants et la police se heurtaient ce jour-là « pour la troisième journée consécutive », sur fond de protestation contre une troisième candidature à l’élection présidentielle du chef de l’État d’alors, Abdoulaye Wade, au terme de son deuxième mandat à la tête du pays.
La recherche fait apparaître dans une autre photo de la même scène avec les mêmes personnages, également par Rebecca Blackwell, où l’on peut voir du sang sur le côté gauche du policier tenant le pistolet. Elle est dans la base de données d’Alamy en accès restreint avec comme référence 2NAA4PN, et elle illustre également une dépêche d’AP datée du 18 février 2012 publiée par Deseret News, plateforme d’un journal états-unien basé dans l’État de l'Utah et affiliée à l’église mormone.


Présidentielle sénégalaise de 2012 précédée par des violences
En 2012, le premier tour de la présidentielle a été organisé le 26 février, avec quatorze candidats en lice. Le second tour s’est tenu le 25 mars. Macky Sall en a été déclaré vainqueur avec 65,8 % des voix face à Abdoulaye Wade (34,2 % des voix).
De vives tensions ont précédé le scrutin, elles ont dégénéré en affrontements entre forces de l’ordre et protestataires après que le Conseil constitutionnel a validé la candidature d’Abdoulaye Wade, le 27 janvier 2012. En un mois, les violences ont fait « entre 6 et 15 morts, selon les sources », et plusieurs dizaines de blessés, comme on peut le lire dans un article mis en ligne le 28 février 2012 par le magazine panafricain Jeune Afrique.
Article complété et édité par Coumba Sylla.
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